Comment gérer le sentiment de frustration en dessin ou peinture ?
Vous arrive-t-il de fulminer intérieurement (ou extérieurement) quand vous dessinez ou peignez parce que vous n’arrivez pas à vos fins ? Ce sentiment de frustration de ne pas arriver à un certain résultat. Au final, vous vous fatiguez, vous vous découragez, et vous faites de ce moment de loisir et de bien être un moment laborieux, un moment subi.
Ce sentiment de frustration est tout à fait normal. On l’a tous plus ou moins expérimenté dans la vie en général et dans les domaines d’apprentissage en particulier. C’est plutôt la manière dont on va le vivre qui va déterminer la suite : soit être un booster pour s’améliorer ou, au contraire, être un obstacle au progrès.
Voici quelques conseils pour vous aider à gérer ce sentiment et en faire un catalyseur de progrès:
Se donner du temps dans l’apprentissage et se détacher du résultat.
Ce sentiment de frustration nait le plus souvent d’une attente très élevée de réussir tout de suite ce que l’on entreprend. On ne se laisse aucun droit à l’erreur. Si l’on réfléchit 5 minutes, c’est de l’ordre du fantasme, c’est totalement illusoire. On veut réussir en un dessin ce que d’autres ont dû peaufiner en plusieurs années de pratique. Comme disait Auguste Renoir, « Ce dessin m’a pris 5 minutes, mais j’ai mis 60 ans pour y arriver ». Là on parle d’un grand maître et je vous rassure, pas besoin de 60 ans de pratiques pour aboutir à des dessins et peinture de qualité.
Dans mes cours, à travers divers exercices, j’enseigne des principes théoriques, je donnent des clefs pour bien observer, je montre des gestes et techniques mais il est certain que toutes ces notions ne peuvent être acquises instantanément au cours d’un seul exercice. L’entraînement à moyen ou long terme est la clé pour s’approprier tous ces enseignements. Le meilleur professeur, c’est l’élève lui-même : en fonction de ses expériences, de ses réussites et de ses ratés, il va pouvoir cheminer dans l’apprentissage du dessin et de la peinture en réajustant sa façon de faire et en gérant sa frustration.
L’attente d’un résultat immédiat est donc le principal obstacle au plaisir de faire et, du même coup, à la fluidité de l’apprentissage et aux progrès. Je dis souvent aux élèves qu’il faut être prêt à jeter son dessin sans aucun état d’âme et passer au suivant pour se libérer dans l’apprentissage. En se mettant dans cette disposition, on désacralise le résultat, on se libère davantage et, paradoxalement, on obtient des résultats.
Accepter le sentiment de frustration et en faire un booster d’entraînement.
Je pense qu’il est important de ne pas nier la frustration. Si elle est là, c’est qu’elle a besoin de s’exprimer. Peut-être que cette frustration est le reflet d’une forte exigence avec vous-même de manière générale, dans beaucoup de domaines. Il est donc normal qu’elle apparaisse aussi quand vous vous exercez en dessin ou peinture. Ainsi, je pense qu’en accueillant cette frustration, comme un processus normal, vous faites déjà un grand pas. En l’acceptant, vous en prenez conscience aussi, donc vous avez moins de chance de la subir.
Reste ensuite à savoir comment vous allez composer avec cette exigence qui vous crée cette frustration :
- Cette exigence devient problématique quand elle vous décourage, quand elle vous paralyse, quand vous pensez que tout doit être intégré tout de suite, que vous ne vous laissez pas de possibilité de tâtonner, de vous tromper, en bref quand vous la subissez. Vous finissez alors par gâcher le moment de création que vous vous accordez.
- En revanche, cette exigence peut être très positive quand elle n’est pas subie, quand elle vous pousse à faire les choses de manière appliquée et vous incite à pratiquer jusqu’à parvenir à vos fins. Elle devient un moteur qui vous assurera des progrès évidents, à condition de les étaler dans le temps. Car tous les grands artistes s’accordent à dire que le travail, la pratique régulière donnent forcément des résultats dans le temps, quelles que soient les prédispositions au départ.
Se connecter au présent à son envie première.
Une fois que vous avez réorienté votre exigence vers une tournure plus positive (« si je rate, c’est pas grave, j’en recommencerai« , « je ne lâche rien…« ), il ne vous reste qu’à savourer les moments de dessin et de peinture. En effet si vous vous y êtes mis c’est sûrement parce que vous y trouvez un certain plaisir. En vous connectant le plus souvent à ce plaisir véritable, à cet instant précieux que vous vous accordez, vous prêterez de moins en moins attention à cette petite voix critique, ou vous l’évacuerez en pensant : « ça y est, tu t’es exprimé ? Maintenant laisse-moi profiter ! »
J’ai personnellement vécu ces frustrations et si aujourd’hui j’ai toujours cette forte exigence envers moi-même, je la mets au service du travail, de la pratique. J’en fait un booster pour me perfectionner et je prends du plaisir à peindre et dessiner. Je jette beaucoup de dessins et je recouvre beaucoup de toiles ratées. Ça fait partie du jeu !
Je vous souhaite de vous épanouir dans vos créations.
Au plaisir,
Delphine